Siphis Vlasto Resistance Leader, Crete C15th
05-2000
XXX INTRO XXX
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De 1204 à 1453, année de la chute de Constantinople, la Crète vécut dans un état d'insurrections successives plus ou moins importantes. Les plus marquantes furent celles de Léon Callergis en 1341 et celle des nobles vénitiens en 1363.
Suivit une période relativement calme d'à peu près un siècle. L'évènement d'un retentissement universel que fut la chute de Constantinople, tombée aux mains des Turcs allait de nouveau apporter un climat insurrectionnel en Crète. Venise ne s'était pas rendu compte assez tôt du danger que représentait la venue des Turcs sur le Bosphore et n'avait pas assez aidé Constantin Paléologue. Elle avait envoyé des trirèmes à son secours et trois d'entre elles étaient montées par des crétois. Ce sont eux, qui retournant dans l'île, annoncèrent l'importante nouvelle qu'était la nouvelle domination de Constantinople, et renforcèrent chez les crétois un fort sentiment d'irrédentisme et la création de nouveaux foyers insurrectionnels.
Siphis Vlasto, descendant d'une noble famille qui avait quitté Byzance trois siècles auparavant pour s'installer en Crète, conçut le rêve audacieux de faire de la Crète, un nouvel état grec. Aidé par le clergé, réfugié en Crète après avoir quitté Constantinople, le petit-fils de son homonyme et fils de Thomas Vlasto se mit à la tête du mouvement insurrectionnel avec une détermination courageuse.
Au sujet de la date de cette insurrection, les hésitations sont nombreuses. Certains pensent à 1453, mais cela est peu probable puisque c'est l'année de la chute de Constantinople, le 29 mai, et que le temps restant pour fomenter une révolution était trop court. Lamansky, historien russe ayant eu accès aux archives de Venise note l'année 1458. Trois ans après l'évènement. Un temps assez important pour préparer ce mouvement insurrectionnel... Le professeur Dolcetti qui eut lui aussi accès aux Archives de Venise met en exergue un document datant du 13 novembre 1454, par lequel, le gouvernement de Venise impose des restrictions au clergé orthodoxe de Crète à cause de l'insurrection de Siphis Vlasto. Ce document fort long contre le clergé, mentionne dans sa fin que la répression de l'insurrection avait eu lieu avant la fin de 1454, rapidement jugulée.
Un autre document du Sénat vénitien adressé au duc de Crète, mentionne qu'aux côtés de Siphis Vlasto d'autres patriotes vinrent se ranger, Jean Melissinos et Georges Gavala. Il y est fait mention des :
"conspirations et trahisons de Siphis Vlasto ainsi que ses complices et partisans".
Il est dit également dans le même document :
"....la dernière insurrection de la Crète que Siphis Vlasto a tenté contre notre Etat".
Le clergé prit une part importante dans ces mouvements en raison des luttes et de l'animosité qui se manifestait entre les clergés catholiques et orthodoxes, les premiers voulant annihiler le clergé grec, non seulement en Crète mais dans toute contrée du territoire hellénique se trouvant à cette époque sous le joug vénitien.
Le plan de Siphis Vlasto, organisait dès les premières heures du soulèvement les arrestations de tous les fonctionnaires vénitiens et leur massacre, de nuit, et l'arrestation des autres étrangers, les latins, que l'on aurait emprisonné. Toute possibilité de résistance de la part des vénitiens étant ainsi écarté, aurait été immédiatement proclamé l'affranchissement de la Crète du joug étranger.
Kérofila snous indique à juste raison que l'on ne possède aucun document de source grecque qui nous aurait donné le récit fidèle de l'action de Siphis Vlasto. D'autre part les archives vénitiennes renferment certainement des pièces relatives à ces évènements; mais ils n'ont pas été découverts.
Un historien de l'Empire turc, Zinkeisen donne sur un point intéressant une version différente des faits précédemment cités.
"... Un Grec, notable de Rethymno, du nom de Vlasto, avait conçu en 1453 le projet diabolique de massacrer en un jour et à la même heure tous les fonctionnaires vénitiens ainsi que tous les chevaliers de marque. On aurait alors proclamé roi, un indigène, appartenant à la famille exilée des Paléologues qui aurait alors exercé sa souveraineté sur la Crète. Le projet fut adopté. Les conspirateurs se multipliaient de jour en jour et déjà il était question de mettre à exécution le massacre projeté, quand des conspirateurs, un prêtre et un juif dénoncèrent le complot au Duc Benedetto Vitturi. Il fut très aisé, à la suite d'une telle dénonciation d'arrêter les conjurés qui furent emprisonnés puis mis à) mort sans autre forme de procès. Les dénonciateurs furent récompensés par le Sénat qui les combla d'honneurs et de propriétés rémunératrices".
Ce récit diffère des autres sur le seul point où il est dit que Siphis Vlasto avait décidé de céder le gouvernement de Crète à un des Paléologues en exil. Cette version a été également adoptée par Hertzberger1 qui s'est largement inspiré de Zinkeisen dans les moindres détails.
Un autre historien, B. Psilakis donne une autre version de cette conjuration mais embrouille les dates et les évènements, et en arrive à créer deux mouvements distincts, celui de Siphis Vlasto et celui de Jean Gavala ce qui est complètement erroné.
Le complot contre les vénitiens avait été préparé dans le secret de plus absolu et les autorités vénitiennes n'en auraient rien su s'il n'y avait eu parmi les conjurés un traître, le prêtre Lima. Les documents officiels vénitiens mentionnent quand à eux deux dénonciateurs, ce prêtre et le juif David Mavrogonato, tous deux de Rethymno.
Il faut écarter l'idée qu'un juif put faire partie des conjurés car les juifs, en Crète étaient des personnes de condition misérable et que la conjuration avait été préparée par des notables. Il est donc invraisemblable que Siphis Vlasto ait pu admettre un juif au nombre de ses collaborateurs. Kérofilas pense qu'il est préférable de penser que Lymas se soit ouvert à Mavrocoronato et qu'ils aient ensemble dénoncé le complot.
Psilakis, quant à lui pense que Mavrocoronato était à Venise et que Lymas s'en vint le trouver , pour lui exposer ce qui se passait. Le juif s'empressa alors de tout rapporter au Conseil des Dix et le délégua immédiatement avec la mission d'agir à sa guise, au mieux des intérêts de l'Etat.
Deux auteurs donnent de cet évènement une version qui peut être considérée comme véritable. Andréa Corner et Cornelius.
Andréa Corner2 raconte que Lymas et le juif Mavrogoronato dénoncèrent le complot au duc Vénétien de Crète et non au Doge de Venise, appuyé en cela par Cornelius qui écrit:
"En 1453, Benedetto Vitturi fut envoyé en Crète en remplacement de Balbi. Sous le gouvernement de ce Vitturi, un certain Siphis Vlasto, Grec de Rethymno, avait conçu avec la collaboration d'aures partisans, également des Grecs originaires de l'île, le projet de se révolter contre la domination vénitienne, de couper en morceaux les autorités de la ville, les nobles ainsi que les Vénitiens latins, pour devenir eux-mêmes les maîtres de l'île, ou faire appel à quelqu'un auquel ils auraient offert la souveraineté. A cette fin il préparèrent dans leurs maisons leur matériel de combat. Cette trahison vint à la connaissance d'un prêtre de Rethymno, Lymas, et du juif David Mavrogoronato, qui, fidèles à la République, la dénoncèrent au duc. De son côté, André Callergis, fils de feu Georges Callergis, fit avorter la révolte dès qu'il en fut informé. C'est donc ainsi que le duc arrêta avec le concours des partisans de Callergis, le révolutionnaire Vlasto et ses collaborateurs, qui reconnus coupables, subirent la mort qui convenait à leur crime. Voilà comment cette révolte fut étouffée."
Qui était Lymas ? Sathas l'appelle "l'espion des Vénitiens, apparemment Latin, si l'on juge par le nom".
Kérofilas pense que c'est étrange de la part d'un historien tel que Sathas, de commettre l'erreur prendre Lymas pour un latin, quand dans son même ouvrage il parle du grand intendant Marc Lymas, byzantin embarqué dans les trirèmes du fils de l'empereur pour venir s'installer en Crète !
Gerland3 nous donne beaucoup de détails sur cette famille Lymas et précise qu'un prêtre portant le nom de Lymas fut impliqué dans la conjuration de Siphis Vlasto.
Lorsque les autorités vénitiennes furent mises au courant de la conjuration, ils chargèrent André Callergis d'étouffer le mouvement par n'importe quel moyen. Le rôle tenu parce grec fut odieux et "ne cesse de stigmatiser l'histoire de cette famille" et Venise l'employa plus d'une fois contre les crétois révoltés. Et ajoute Kérofilas, "si André Callergis a mérité de la reconnaissance nationale, par contre il s'est trouvé des descendants de cette noble maison qui ont déshonoré son nom".
Après avoir arrêté Siphis Vlasto et les autres révolutionnaires, André Callergis, investi d'une liberté d'action absolue usa pour réprimer la révolte de la "violence la plus inhumaine".Il en fut récompensé moralement et matériellement par l'Etat Vénitien et le Sénat de Venise alla même jusqu'à lui exprimer sa gratitude par écrit, ce qui n'était pas dans les usages. Il avait eu pour collaborateur, son frère Jean ainsi qu'il en est fait mention dans un décret du 23 mai 1472.
Après l'arrestation de la famille de Siphis Vlasto, les inquisiteurs le soumirent, lui, son épouse et sa fille, à la torture pour leur faire dénoncer les autres conjurés et leur faire révéler leurs plans. Mais tous trois et même la jeune fille de quinze ans gardèrent un silence absolu. Même les supplices ne parvinrent pas à ébranler leur courage.
S.P. Zambelios fait un tableau saisissant de ces tortures :
"... Autrefois on appliquait la pendaison par les cheveux (tortura capillorum), beaucoup plus douloureuse que la torture des brodequins, sa sœur. Alors le patient n'était pas suspendu par les aisselles ou par les bras, mais par sa chevelure tressée à même la corde de la poulie. Des rivets en fer étreignaient ses métatarses, tandis que le bourreau flagellait son dos avec des lanières à plombs. La pendaison par les cheveux était spécialement réservée au beau sexe aux longues tresses. La femme et la fille du patricien Vlasto, qu'on appelait Siphis, furent soumises à cette torture pour leur faire dévoiler les noms et répéter les propos tenus chez elles par les conjurés. La pucelle de quinze ans, aussi belle que la Beatrice Cenci de Rome, qui fut mise à mort par le Pape, succomba aux douleurs de la torture, après que des tenailles eussent réduit sa langue en lambeaux."
Tels furent les supplices effroyables et la mort que subirent ces deux héroïnes. On ne connaît pas comment fut exécuté Siphis Vlasto, mais il est certain que ses tortures ne furent pas moindres que celles subies par sa femme et sa fille.
Le supplice eut lieu à l'endroit dit :"Tête de Potence", emplacement réservé aux exécutions capitales, hors de Rethymno, aménagé sur une colline rocheuse surplombant le cimetière chrétien de Messambeliotissa, près de la grotte de Magara.
Dans son Histoire des insurrections crétoises, Jean Condylakis rapporte également que parmi les autres conjurés se trouvaient deux frères, Jean et Georges Gavala.
Mais ceci est en partie faux puisqu'il a été découvert dans certains documents des archives de Venise qu'ils avaient trahi la conjuration. Cependant au tout début ils étaient partisans de Siphis Vlasto et ne furent - s'ils l'ont été - pas parmi les dénonciateurs de la première heure. On sait également qu'ils n'ont pas reçu de récompenses sous quelque forme que ce soit, ce que l'on sait fort bien avoir été fait pour Lymas, Mavrogonato et Callergis. Le Gouvernement vénitien avait été d'une prodigalité certaine envers tous les traîtres et la liste est longue, de tous ceux qui ont reçu pensions et rentes après les "services rendus".4
Le Gouvernement vénitien se montra encore plus généreux envers Mavrogonato. Il reçut de l'argent en quantité importante, mais grâce à lui, les juifs de Crète bénéficièrent de privilèges importants. Cela changea leur statut, qui jusqu'alors était assez misérable. Et la famille Mavrogonato resta en Crète jusqu'à l'occupation de l'île par les Turcs. A ce moment les Mavrogonato quittèrent l'île après deux siècles de tranquillité après leur trahison.
Siphis Vlasto échoua dans sa tentative de révolution. Mais cette tentative constitue, après la chute de Constantinople, le premier mouvement insurrectionnel organisé en faveur de la libération de la Grèce du joug étranger.
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