2. Le site
La ville d'Avranches, perchée à une centaine de mètres d'altitude, est située à l'extrémité d'une barrière granitique orientée est-ouest. Ce rempart naturel, anticlinal spectaculaire du massif armoricain, culmine à l'est dans le Mortainais pour s'achever à l'ouest face à la baie du Mont-Saint-Michel. Au pied des flancs nord et sud de ce massif, coulent respectivement les deux rivières, la Sée et la Sélune, qui se jettent dans la mer. Avranches surplombe les deux estuaires et occupe par conséquent une position stratégique indéniable.
Avranches se divise assez nettement en deux secteurs. D'un côté, à l'extrémité occidentale de la cité, on trouve la "vieille ville", fortifiée depuis le Moyen Âge et peut-être dès l'époque gallo-romaine.
à l'est, la "ville basse" s'organise autour des places Saint-Gervais et du Marché. Le site du donjon est à la jonction des deux quartiers. Cette zone possède une très faible déclivité. L'édifice commandait l'endroit le plus fragile du système défensif de la vieille ville, là où l'escarpement naturel est le moins prononcé. Il surplombait vers l'est le quartier populaire des artisans et des marchands.
Du début du Moyen Âge jusqu'au rattachement de la Normandie à la couronne de France en 1204, deux personnages se divisent l'espace clos de la ville fortifiée: d'un côté l'évêque, dont le palais et la cathédrale se situent à l'extrémité occidentale de l'éperon; et de l'autre un chef laïc, dont le lieu de résidence présumé n'est autre que le site qui nous préoccupe.
Si le donjon n'est pas installé à l'extrémité de l'éperon rocheux, comme il aurait pu être judicieux de le faire pour des questions de surveillance du littoral, c'est que cet emplacement fut occupé bien avant sa construction. Après la christianisation, un "complexe religieux", palais épiscopal et cathédrale, se substitue à un ensemble de constructions antiques. Le premier édifice religieux à cet emplacement est daté par Daniel Levalet du IVe ou Ve siècle. Un mur plus ancien, construit directement sur la roche mère, pourrait quant à lui faire penser à un fanum, mais d'époque gauloise. L'occupation de ce site est continue jusqu'à l'effondrement puis la destruction de la cathédrale romane au début du XIXe siècle.
Le donjon est traditionnellement placé dans ce que l'on appelle "la première enceinte du château". En fait, on suppose que les instances militaires occupaient un vaste secteur, limité à l'est par le rempart de l'actuelle place d'Estouteville et à l'ouest par les rues de Geôle et Chevrel. Ce périmètre de forme plutôt oblongue s'étire du nord au sud. à chacune des extrémités se trouvaient les deux principales entrées de la ville fortifiée, les portes Baudange et de Ponts. La première enceinte se trouvait à l'extrémité sud de cette zone, la seconde au nord.
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